mercredi 17 février 2010

Une Yourte à Lentilly !!

Quoi? Où ça? Comment? Pourquoi??

C'est la neige, sûrement. Il doit faire trop froid par là-bas, ils viennent chez nous. Remarquez, avec le temps sibérien qu'il fait en ce moment à Lentilly, ils seront pas dépaysés au moins...

En effet... La yourte, c'est l'habitat traditionnel des populations d'Asie centrale, notamment au Kirghizstan, Kazakhstan et autre Karakalpakistan et Kikiristan(à mes souhaits!). Cette tente circulaire est en quelque sorte le pendant européen du tipi des Indiens d'Amérique. Comme ces derniers, les populations ayant adopté la yourte ne sont pas sédentaires. La relative rapidité à laquelle elle peut être démontée puis installée en a ainsi fait l'apanage des populations de nomades mongols et turcs.


Les nomades qui ont établi leur camp à Lentilly ce lundi 8 Février n'ont pas franchement l'air tout droit débarqués des contreforts de l'Oural. D'aucuns diront même qu'ils n'ont pas "1 tronche très mongolienne" ... N'empêche, mieux vaut se méfier. D'accord, les chevaux de Przewalski ont été remplacé par vans et remorques. Ok, le goudron sur lequel s'est posée la yourte n'a pas grand chose à voir avec la steppe sibéro-mongole. Et après??? Sitôt passée l'entrée de la yourte, nous voilà immergés dans un univers intimiste et chaleureux. Les nomades se transforment alors en hôtes hospitaliers (un comble, non?) poussant même le vice jusqu'à ... nous faire partager un thé préparé par leurs soins.

C'est ce rituel ancestral et typique qui a inspiré Saïlen Rose, Benoît Héliot et Matthieu Sampic en 2006. Membres de la compagnie Prise de Pied, ils ont imaginé un spectacle vivant, convivial, drôle et techniquement monstrueux (j'y reviendrai). Les deux premiers ont interrompu le spectacle pour une pause bébé et depuis travaillent sur d'autres pestacles. L'équipe actuelle est donc en place depuis la fin de l'année 2008, seul Matthieu est de l'aventure depuis le lancement.


J'ai eu le droit, l'aubaine, le privilège, que sais-je, de passer 4 jours à leurs basques pour réaliser un reportage. Je souhaitais élargir la focale qui aurait pu me faire me cantonner à la seule "photo de spectacle". Une telle approche est tout à fait nouvelle et inconnue pour moi. C'est la 1ère fois que je photographie de la sorte. Pour Lettres de Délation, j'avais contacté le comédien, mais au final, lors des prises de vue, j'étais noyé dans le public. Là, j'ai voulu aller plus loin, à la rencontre de ces artistes, de leur travail dans l'optique d'en rendre compte afin d'apporter un éclairage complémentaire sur leur performance scénique. En abordant ainsi l'Humain comme sujet photographique, je me mets un peu en danger, je ne me cache pas derrière l'appareil pour une fois. La contre-partie, c'est la possibilité de faire des rencontres, de mieux comprendre les personnes et de découvrir les facettes cachées de leur métier.

Même si je n'avais pas pris trop de risques d'être déçu (le monde du cirque, des troubadours et des saltimbanques m'attire et me passionne), je suis malgré tout tombé sur du gros. Du très très gros même. Abd al Malik ne trouverait rien d'autre à dire que "c'est du lourd. Du lourd.. Un truc de malade..." pour qualifier leur travail et leur existence. D'ailleurs, que pourrait-il dire d'autre devant ces 4 jeunes gens qui font rimer talent avec exigeant, travail avec bataille mais pour qui l'activité professionnelle réduit la vie personnelle à une ligne en pointillés...les aléas des programmations espaçant plus ou moins les lignes pleines. Malgré les difficultés matérielles, exacerbées par les conditions climatiques de ces 4 jours et la conjoncture actuelle loin d'être folichonne qui tend à transformer les intermittents en intermendiants, malgré tout cela donc, les membres de la compagnie Prise de pied ont la bonne humeur solidement chevillée au corps. Si le spectateur est émerveillé devant leur prestation sur scène, moi j'ai été subjugué par la richesse de ces 4 jeunes gens, de leur ressources physiques et mentales.

Je tiens donc à leur dire bravo, mais aussi merci..Merci pour ces moments partagés, pour ces bouts d'intimité qu'ils m'ont laissé leur voler, pour m'avoir accueilli, pour m'avoir fait m'évader 4 jours durant. Quand je leur ai dit au revoir jeudi matin, j'étais triste comme quand on quitte une colo, comme quand on sort d'un rêve magique et qu'on percute à peine que c'était pas réel.. Oui, c'est cela. 4 jours durant, j'étais dans un rêve avec 4 amis.


Pour toutes ces raisons, j'ai voulu que mon reportage soit un hommage tout autant qu'un témoignage.

Un hommage à leur bonne humeur, un témoignage de leur labeur
Un hommage à leur prestance, un témoignage de leur existence
Un hommage à leur vie de bohème, un témoignage de leurs problèmes
Un hommage à leur liberté, un témoignage de leur précarité
Un hommage à leur travail, un témoignage de leur bataille
Bref ...
Un hommage aux sourires qu'ils savent déclencher, un témoignage des difficultés qu'ils ont à surmonter


Le traitement de mes photos peut surprendre, choquer même peut être. Je voulais quelque chose de différent des clichés de ce spectacle qui ont été déjà réalisés par d'autres que moi. En quelque sorte, je voulais les remercier à ma façon, en laissant mon empreinte sur mes photos. Car comme mes mots, mes photos, telles que je les cadre, compose et traite sont très personnelles. C'est un moi profond qui s'exprime dans mes photos, traduisant en quelque sorte la façon dont j'ai vécu cette expérience avec la compagnie Prise de Pied.
Ainsi, au travers du traitement et l'approche un peu décalée voire déroutante qui en résulte, j'ai voulu suggérer dans mes clichés le caractère intemporel et universel que revêt Thé perché, mais aussi faire ressortir la bonne humeur récurrente qui pointe dans la noirceur du travail de ces intermittents combattants... Pour ne pas oublier qu'être un artiste c'est un métier et pas seulement un état d'esprit ou une lubie. Tout cela en ne faisant qu'effleurer, qu'éclairer de manière très ponctuelle leur spectacle. Je ne vais pas le résumer, je ne suis pas là pour ça. C'est juste pour vous donner envie d'aller leur rendre visite dans leur yourte..


Vu que j'ai beaucoup mitraillé, pendant pas loin de 20 heures, j'ai devant moi une foultitude de clichés. Le tri s'avère long bien qu'agréable, le choix s'avère cornélien. Quant au traitement, je veux qu'il aboutisse au rendu que j'imaginais lors de la prise de vue, correspondant tout pile poil à mes attentes... Cela implique un travail laborieux, un peu fastidieux, mais surtout méticuleux. La lenteur de mon Mac n'aidant pas, je ne finalise que quelques photos par jour.

Au regard de la matière de ce reportage, j'ai décidé de publier les photos et les textes au fur et à mesure. Vous revivrez ainsi chronologiquement les différents moments qui m'ont marqué pendant ces 4 jours, du montage de la yourte aux ultimes préparatifs, en passant par les répétitions et entrainements pour finalement déboucher sur le point d'orgue de ce reportage : la performance scénique elle-même.


J'espère que je provoquerai chez vous suffisamment d'intérêt, que mes photos et mes mots susciteront suffisamment de curiosité pour que chez vous pointe l'impatience qui vous amènera chaque jour avec empressement sur mon blog. Je vous le promets, chaque jour il y aura du thé dans vos verres. Oups, de quoi se mettre sous la dent, de nouvelles choses à découvrir, des photos à voir ou des lignes à lire...

Pour que ceux qui découvrent ce fil puissent suivre chronologiquement les apparitions, je vais avoir recours à un subterfuge technique. Le texte que vous venez de lire sera toujours en haut de page, il ne faut pas se fier aux dates de parution.. Les mises à jour se feront à la suite, en dessous. Pour y accéder, soit vous faites défiler, soit vous cliquer sur les titres dans la colonne de droite.. Vous pouvez également vérifier le nombre de posts relatifs au libellé Thé Perché qui se trouve toujours dans la colonne à droite de la page..

La suite demain ..



ouais, je sais, c'est dur, ça fait mal.. Mais pas la peine de crier, c'est comme ça que ça se passe..

dimanche 14 février 2010

Présentation de l'équipe

Aujourd'hui c'est la prise de contact avec la troupe. J'avais eu le "chef" au téléphone quelques jours auparavant, rien de plus. Lundi 8 février donc. 13h50 à une vache près. Rencontre du 3ème type avec une espèce en voie de disparition : les intermittents du spectacle...

Quatre des membres de la compagnie Prise de pied sont là. Il faut savoir que les artistes ne sont pas exclusivement liés à une compagnie spécifique. Dans le cas présent, les 4 acolytes travaillent sur des projets annexes, ayant plus ou moins de lien avec le concept qui anime Thé perché.


Trêve de palabres, attaquons les présentations.

Commençons par Matthieu, maître des lieux puisque dépositaire des clefs du temple.



Formé à l'IGTS (Institut Grenoblois des Techniciens du Spectacle), il est le régisseur en chef, mais touche tout autant sa bille en termes de compétences saltimbantesques. Son projet professionnel a pour le moins du génie et de la classe. Excusez du peu : sorti de l'école, il monte une association qui, avec quelques milliers d'euros, achète une yourte (LA yourte) ainsi que du matos son et lumière. Objectif : se "louer", lui et sa yourte, au plus offrant, Oups, au plus attirant scéniquement et éthiquement, en vue d'intégrer des projets artistiques. C'est ainsi qu'il rejoint la compagnie Prise de pied et participe à l'émergence de Thé perché avec Saïlen et Benoît en 2006. Ca cogite sévère dans sa carlingue!!
Comme je l'ai dit, il prend part à d'autres aventures. En avril 2007, il a ainsi été bourlingué 2 semaines durant avec la compagnie Tallaron pour accueillir sous sa yourte Franck Adrien jouant Novecento Pianiste. Ces noms vous disent quelque chose? C'est normal, Franck Adrien a joué ce spectacle à Lentilly dans le cadre de la saison culturelle le 28 novembre 2009. Le monde (artistique) est petit...


2nd larron à présent. J'ai nommé el signor Christophe, pour vous servir.



Mac Gyver de service avec sa frontale Petzl en quasi permanence autour du coup (je n'ose imaginer où il irait dû ranger une torche Maglite...). Il est au taquet, le sourire vissé sur le visage, pour que les tracas techniques soient réduits au silence. A l'instar de Matthieu, Tof' a une formation de technicien du spectacle, mais aussi de comédien, et maitrise bien entendu un bon nombre de bases circassiennes. Il tourne avec d'autres compagnies, comme régisseur ou comme acteur. Au fin fond de sa tête, bien caché, un projet. Un spectacle de marionnettes. De tout coeur, j'espère pour lui qu'il se réalisera. Inch Allah comme on dit là bas!



Les 2 derniers éléments de la troupe, je vous les présente ensembles tant ils sont indissociables, tant leur complémentarité est à souligner. Tout le temps fourrés ensemble. Tout le temps en train de monter l'un sur l'autre. Drôle d'idée... Vous découvrirez dans quelques jours pourquoi.





Gwen et Vincent se sont connus à l'école du cirque de Lyon, à Ménival. Ils y ont chauffé les locaux pendant une dizaine d'années en "loisirs". Je mets des guillemets pour suggérer le caractère tout relatif de la dimension loisir que devait revêtir leur activité à l'époque vu leur niveau à l'heure actuelle. Ils devaient y être tellement souvent que dans leur esprit a germé l'idée saugrenue d'en faire un métier. Direction Lille pour une formation professionnelle de 3 ans donc. Depuis 1 an et demi, ils sont officiellement des artistes, avec le statut d'intermittents du spectacle...

Pour couper court à toute élucubration et au risque de déplaire aux aficionados de love story rose guimauve, Gwen et Vincent ne sont pas unis dans la vie. Point à la ligne, chapitre clos, question suivante!! Mais tant qu'on est dans le registre potin potin ascendant ragot tendance commère, j'aimerais évoquer quelque chose qui m'a frappé chez eux. Les 3 hommes sont en couple avec une artiste/personne assimilée gravitant dans la sphère artistique (pas la même hein, une chacun). Ainsi, Matthieu s'est enamouraché d'une chargée de communication d'un théâtre qui travaille par ailleurs dans une compagnie tandis que Vincent a décidé de se faire tirer le portrait par sa peintre de copine. Quant à Christophe, papa d'un bout de choux et demi (ou 3 quarts, je sais pas..), sa dulciné n'est rien d'autre que la moitié avec laquelle il envisage son spectacle de marionnettes.
Un sacré microcosme donc que ce monde du spectacle, qui fait office d'agence matrimoniale dans laquelle les sensibilités et les spécialités s'entremêlent et s'entrecroisent, s'entrechoquent dans un catalyseur intellectuel mettant en synergie la créativité de chacun au profit de l'émulation artistique.

Et Gwen dans tout ça? Bah, Gwen c'est une dame. Or la bienséance interdit de demander à une dame si quelqu'un occupe son coeur et ses pensées. Sérieusement, avec Gwen il y a eu plus de distance. Sans doute parce qu'effectivement c'est une fille et qu'il est plus facile pour moi d'être avenant avec des mecs. Cela a généré une certaine pudeur dans mon approche. Le fait qu'il n'y ait pas eu de proximité immédiate avec elle contrairement aux trois autres s'explique aussi par son accueil que je me hasarde à qualifier de froid. C'est tout à fait subjectif, mais lors de la prise de contact, j'ai ressenti une certaine méfiance dans ses yeux que j'ai imaginé suspicieux. Tout l'après-midi au boulot j'ai gambergé, appréhendant la séance du lendemain. Peur de la gêner. Peur de prendre trop de place. Peur de la brusquer. Peur qu'elle ressente une intrusion dans son univers. Avec pas mal d'appréhension donc, pas loin de l'angoisse pour être honnête, je suis arrivé sur la pointe des pieds, me faisant le plus discret possible. Puis, je me suis approché. De plus en plus. Visiblement, ma présence était tolérée. Finalement, un sourire a fait voler en éclats mes craintes. Gwen m'avait finalement adopté et venait de m'adresser un bon d'entrée dans son monde à elle.
De ce laps de temps durant lequel on s'est mutuellement apprivoisé a résulté la distance que j'évoquais précédemment. Il n'empêche, ce n'est pas parce que les liens ne sont pas exacerbés qu'ils sont inexistants. Non, je peux vous assurer que le respect et l'amitié que je voue à Gwen sont tout aussi réels et solides que si notre complicité avait été visible et extravertie. Il en est de même pour les trois autres membres de la compagnie. Notre rencontre et nos échanges n'ont pas donné lieu à une effusion de sentiments, à une proximité exubérante. C'est le cas dans bien des relations humaines : il faut se méfier de ce qui est exposé. Les liens les plus solides et indéfectibles sont également les moins perceptibles...


Lundi (demain c'est dimanche, donc repos!), si vous êtes au rendez-vous, vous découvrirez les coulisses du montage. Ou comment le parking du centre d'animation s'est transformé en contreforts du Kikiristan oriental!!

Emergence de yourte

Lundi 13h30. La troupe attaque la partie sans doute la moins agréable de la tournée : le montage de la Yourte.. Il fait froid, le soleil annoncé par Météo France est bien bien caché. Tellement qu'on arrive pas à le voir. Mais au moins, il ne tombe rien, ni pluie ni neige.

En 1er lieu, il convient de vider les vans et les remorques. Je donne la main, on essaie de disposer toutes les caisses avec une certaine logique : cables, décor, costumes, outils....

Ensuite, on étale la base, façon bâche à camion plastifiée. Elle permet d'isoler la structure de l'humidité et (un peu) du froid émanant du sol. L'équipe cherche l'endroit adéquat pour la déposer, c'est à dire le plus plat possible. Cette base, c'est le diamètre de la yourte. Ca me semble rikiki. On tient à 80 là dedans??

La bâche étalée, on pose les 2 portes, diamétralement opposées. On déploie alors les treillis en bois, en les fixant entre eux et aux portes par l'intermédiaire de lanières en cuir.



Pendant que les 3 hommes aidés par 2 intérimaires s'occupent du laçage, Gwen s'attèle au montage de l'échafaudage.



Sur cet échafaudage, Christophe et Vincent vont hisser la roue en bois qui constitue la structure supérieure de la yourte. C'est son toit en quelque sorte. D'humeur taquine, Gwen fait remarquer qu'elle n'a pas serré les vis papillon. Les 2 larrons étaient d'ores et déjà en haut de l'échaffau(dage). Mais bon, ça n'a pas l'air de les déranger plus que ça. Une fois la roue calée en haut sur leurs têtes, ils ont entamé une conversation métaphysique dont les tenants et aboutissants m'ont malheureusement échappé!



Il faut faire assez vite à ce moment là. Mine de rien, la roue pèse son poids, et l'équilibre des 2 est un peu précaire là-haut. Les personnes au sol s'attèlent donc rapidement à stabiliser la roue en hauteur. Comme pour les tipi, l'armature se compose de tiges qui, une fois harnachées, s'auto-équilibrent. Quand 9 d'entre elles sont enfin fixées, la situation est considérée comme stable. Christophe et Vincent redescendent parmis nous.



Il faut alors consolider la structure en installant les autres tiges. 80 en tout, reliant les treillis à la roue.



C'est un peu long, et le froid n'arrange pas les choses : les doigts endoloris transforment la fixation des lanières en chemin de croix.



14h45 : je dois partir, j'attaque le boulot à 15h.. Dur dur de concilier les 2, j'ai l'impression de courir partout, sans arrêt.

Je laisse la troupe poursuivre le montage. Avec l'entraînement, ils arrivent à finaliser le montage de la yourte, les installations électriques et le décor en 4 heures. Ce jour-ci ils finiront vers 17h. Une fois que les treillis et les tiges sont unifiés, l'armature est consolidée et auto-équilibrée. Il convient alors de dresser les murs. Des panneaux de feutre trouvent leur place sur les parois, se fixant sur les treillis et les tiges. La yourte est alors isolée de la lumière et du froid (si si, je vous l'assure!!). Il est également nécessaire de recouvrir le tout d'une toile imperméable et solide, un peu moins épaisse que la bâche au sol. C'est le garant de l'imperméabilité de la yourte. A partir de là, la phase critique est passée. La troupe débute le travail en intérieur, finalisant l'installation des décors mais aussi de la régie son et lumière..

Hormis quelques petites frayeurs générées par l'instabilité des branchements électriques, pas de mauvaise surprise. Si peut être une : malgré les précautions qui ont pu être prises, la pente du substra a généré une inclinaison certaine du toit de la yourte, mais aussi du sol. Imperceptible pour moi, mais pas pour Vincent et Gwen. Problématique pour les représentations. Il faudra faire avec et prendre sur soi. Mais le plus important est atteint: le public peut être accueilli, le spectacle se fera dans des conditions qui passeront pour optimales aux yeux des spectateurs..

Under the snow

La neige a fait son apparition. Elle est tombée
en abondance depuis le milieu de la nuit de lundi à mardi et toute la journée durant. C'est chouette, ça rajoute du folklore à la dimension onirique du spectacle. On serait presque pris d'empathie pour la yourte qui vit ici son baptême du froid, son examen d'entrée dans la taïga sibérienne puisqu'à ce jour, jamais elle ne s'était drapée dans un blanc manteau neigeux.



N'empêche. Les flocons ont beau conférer un aspect magique à la yourte qu'on imagine toute droit sortie de Mongolie, ils ont tendance à compliquer les choses. Mise en place nécessaire d'un système D pour ne pas rentrer des tonnes de neige à l'intérieur. Le froid s'immisce dans la yourte et dans les corps. L'humidité frappe les tissus et les articulations. Dur dur donc. L'entrainement, que vous découvrirez demain, se tiendra donc finalement à l'intérieur du Centre d'Animation.

samedi 13 février 2010

A l'écoute de son corps

Gwen et Vincent m'ont laissé pénétrer leur univers, m'ont autorisé à entrer dans leur bulle. Ce cocon, c'est leur espace, leur réponse à la spécificité de leur statut faisant qu'ils n'ont aucun lieu de travail mais une infinité d'endroits où travailler.



Cette bulle les isole de leur environnement direct, fait de bruits et de tracas. Silence et concentration sont les barrières qu'ils ont érigées afin de se prémunir des perturbations. Aucune intrusion ne doit être envisageable durant leur préparation.

La séance commence par un petit échauffement puis une longue série d'étirements. Une certaine plénitude enveloppe Gwen et Vincent. Très calmes, ils s'assouplissent, se détendent et s'étirent. A l'écoute de chaque articulation, de chaque muscle, du corps dans son ensemble,





Ce corps, c'est leur outil de travail. Il faut donc le choyer, le ménager, le préserver des blessures. Lorsque je leur demande s'ils ont déjà été confrontés à une situation délicate suite à une sollicitation trop importante de leur organisme, tous 2 m'indiquent que la tendinite n'est jamais loin. La douleur en embuscade, prête à surgir à la moindre inattention, à la moindre erreur, à chaque faux pas. Tous les deux s'accordent néanmoins sur le fait que lors d'interruptions prolongées la reprise se revèle systématiquement problématique voire douloureuse. Les exercices doivent donc être complets et suivre un rythme et une intensité réguliers.

Dans une ambiance douce dans laquelle flotte comme un parfum zen, les étirements se poursuivent, la souplesse est travaillée



Les deux artistes s'attardent sur les parties de leur corps les plus sollicitées. Pour Vincent, le dos m'a semblé être au centre de ses attentions tout comme ses épaules. Quant à Gwen, ce sont ses pieds et ses poignets qu'elle a longuement massés.





Fin de la préparation corporelle, place à la technique désormais. Mais pas maintenant, demain...

vendredi 12 février 2010

Place à la technique

Je vous l'ai dit lors des présentations : Gwen et Vincent aiment se grimper dessus. Rien de moralement répréhensible. Non, cela s'explique par le fait que leur spécialité ce sont les portés...

Cette discipline exige une rigueur permanente et une discipline irréprochable. Lors de leur formation, les 2 artistes ont "bouffé" du physique et de la technique poussée à son paroxysme. Depuis, le rythme est moins soutenu mais demeure intense. Pour avoir un ordre d'idée, hors scène, il faut compter 3 heures de pratique quotidiennement.

En guise de mise en jambe, tous 2 exécutent quelques équilibres.





Entrons maintenant dans le vif du sujet: des enchaînements techniques qu'il faut répéter ou s'approprier. Les figures sont exécutées, répétées, rererépêtées... encore et toujours. Inlassablement. Jusqu'à ce que l'enchaînement de mouvements atteigne la perfection et que la fluidité soit optimale. Sur scène, rien ne peut être approximatif. Pas de place au hasard, tout doit être maîtrisé. Sur scène, aucune erreur n'est possible.







La tension est palpable entre les 2. Chacun exige de l'autre une attention de tous les instants et que la maîtrise de sa technique soit irréprochable. L'appréhension et la crainte se transforment parfois en peur au moment de lancer une figure difficile qui ne passe pas encore sans accros. Une tension compréhensible, des angoisses légitimes. Si Vincent n'assure pas parfaitement son porté ou sa réception, Gwen chutte. Freine avec les dents. Ou se réceptionne la tête la première. A l'inverse, le moindre mouvement décalé de Gwen, que ce soit dans l'espace ou dans le temps peut s'avérer fatal à Vincent. Un appui trop rapide ou mal positionné, une réception mal dosée et les muscles se contractent plus qu'ils ne le devraient... dans le meileur des cas. Au pire, l'onde de choc se propage jusqu'au dos et aux épaules.



Au final, quelques frayeurs, pas mal de remontrances

-"Gwen... Gwen.. non.. non ... mais non Gwen!!"
-"J'y peux rien... C'est inconscient.."
-"Arrête-toi, Freud il a rien à voir là-dedans"

Mais rien de grave. On peut donc attaquer les répet' dans la Yourte. Venez demain, je vous y ferai entrer. Vincent et Gwen y ont déjà un pied, le regard fixé sur l'objectif. Pas le mien, le leur : la représentation qui a lieu le soir-même. Ne pas se disperser d'ici-là, rester concentrer...



jeudi 11 février 2010

On entre dans la yourte ...

Gwen et Vincent s'attèlent à répéter encore quelques fois les enchaînements qu'ils viennent d'effectuer dans le centre d'animation pour se mettre en condition. Ils s'imprègnent de cet environnement qu'ils connaissent par coeur mais qu'il faut à chaque fois apprivoiser. La pente, l'espace, l'éclairage... Il faut reprendre ses repères. Se ré-approprier la scène. Faire de nouveau sien cet espace.







Tout passe. Vincent me fait remarquer qu'ils se laissent une marge technique dans ce qu'ils exécutent sur scène par rapport à ce qu'ils seraient en mesure de réaliser. Ce matelas technique, c'est leur filet de sécurité.









C'est ainsi un moyen de diminuer la pression: les 2 artistes ne ressentiront pas d'angoisse sur scène à l'approche d'un enchaînement difficilement maîtrisé. Ce rôle de soupape qui évacue la pression, la séance de maquillage le tient aussi. Mais je n'en dirais pas plus aujourd'hui. Il va vous falloir revenir demain...



Il fait froid

Petit aparté météo... La nuit, le thermomètre chatouille les -10. La journée, il n'aperçoit qu'au loin la barre des 0... Conséquence: ces températures qui refroidiraient n'importe quel Mongol sous sa Yourte ne facilitent pas la préparation physique des artistes. Les corps souffrent et se tendent. Les muscles se contractent. Les articulations se raidissent. Les mouvements sollicitent des organismes endoloris par le froid. Les réceptions et les appuis deviennent douloureux. Le froid est l'ennemi a combattre... Surtout pour Gwen qui semble celle qui souffre le plus des morsures de celui qu'on n'avait pas imaginé si intense en début de semaine.





mercredi 10 février 2010

Maquillage et ultimes préparatifs

Ce moment permet à Gwen et Vincent de communier. Un espace de détente, de complicité. Peu de paroles, juste des regards et des sourires. Un rituel qui agit comme un exutoire à la pression qui commence de plus en plus à se faire sentir.









Mathieu et Christophe se préparent également. Tous les 4 s'échauffent, se chambrent un peu. Les vannes fusent, gentilles.







S'ensuit un moment de concentration. Chacun entre dans son rôle. Se remémore ce qu'il doit faire pendant la représentation.







Ce replis sur soi s'accompagne néanmoins d'un partage évident. Une certaine communion entre les 4. Un moment fusionnel pour toute la troupe. Chacun dans sa bulle, chacun dans son coin. Mais tellement lié aux autres.



Un lien invisible mais une fusion sensible. Chacun dans sa bulle, chacun dans son coin. Et pourtant ensembles dans la "chaleur" et l'intimité de la yourte, s'apprêtant à donner le meilleur de soi. Chacun dans sa bulle, chacun dans son coin. Et pourtant ensembles soumis à ce tract qui monte en chacun d'eux. et qui s'amplifiera demain encore...